Victor Bergeon
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Voyages au bout de l'effort
Victor Bergeon incarne ce que signifie aller au bout de ses rêves même lorsque la vie vous met à rude épreuve. Face à la maladie qui l’a confrontée à la fragilité de son existence, il a décidé de ne pas se laisser abattre.
L’histoire de Victor Bergeon n’est pas banale. Elle est celle d’une transformation profonde marquée par un combat acharné contre la maladie et une quête inlassable pour réaliser ses rêves les plus audacieux. Cette histoire commence en Californie en 2014. À ce moment-là, Victor n’est qu’un gamin de 21 ans qui vient de décrocher une bourse d’études dans une grande université sur la côte ouest américaine. Le soleil, le surf, l’océan à perte de vue, les soirées sur la plage. Difficile de trouver un meilleur cadre pour le début d’une histoire qui va vite tourner au cauchemar. « Je vis ma meilleure vie à ce moment-là » raconte-t-il des années plus tard. « Et puis je commence à tousser beaucoup et à cracher du sang. Sur place, je rencontre un médecin qui m’informe qu’il y a quelque chose de grave ». De Santa Barbara, Victor est donc rapatrié d’urgence en France, chez lui à Poitiers. Fin du rêve, début du cauchemar. Ces premiers symptômes alarmants le conduisent finalement à un diagnostic terrifiant : la tuberculose s’est déclarée, une maladie infectieuse grave qui affecte généralement les poumons. « Je comprends assez vite que c’est quelque chose d’important mais je ne prends pas encore la mesure que ça va changer ma vie, mon rapport à la mort et aux gens que j’aime ».
Une quête de sens
Confronté à un premier traitement de neuf mois qui l’a profondément affaibli physiquement, le délestant de 7 kg, Victor a d’abord cru en sa guérison. Cependant, une rechute dévastatrice un an et demi plus tard va le replonger dans le désespoir, l’incertitude et la peur. « C’est là que ça va devenir très compliqué parce que pour la première fois, les médecins, en qui j’ai une confiance aveugle, me disent qu’ils ne comprennent pas ». Il se retrouve à l’isolement pendant un mois complet dans une chambre d’hôpital. Dehors, dans la rue, ça fourmille. C’est le début de l’été, l’Euro de football 2016 bat son plein, les fan-zones grouillent de monde et Victor, lui, regarde ça depuis sa chambre d’hôpital. « Je suis un grand fan de foot, j’adore le sport. À ce moment-là, c’est la folie, tout le monde faisait la fête et moi je suis dans ma chambre d’hosto à me demander ce que j’ai fait pour mériter ça. J’ai 23 ans, je devrais être dans les meilleures années de ma vie, je suis à l’hôpital et j’ai peur que ça s’arrête ». La nuit, il angoisse. Il ne trouve pas le sommeil, de peur de ne jamais se réveiller. « À l’hôpital, j’ai vu une psy, c’était la première personne à qui je pouvais parler sans plomber l’ambiance. Parce que j’étais bien entouré, j’avais beaucoup de copains qui venaient me voir, ma famille, ma maman, mon papa sauf que je n’osais pas leur dire que je flippais de mourir ici dans une chambre avec vue sur le périph ».
Cette rencontre avec la psychologue de l’hôpital sera donc déterminante pour Victor. « Elle m’a permis de mettre de la distance avec tout ça. Plutôt que de me dire que j’étais condamné, je me suis dit que j’avais quelque chose de plus grand à vivre ». C’est pendant ces longues nuits d’insomnie, hanté par la peur et l’incertitude, qu’il a commencé à rêver d’une vie au-delà de sa maladie. Ces rêves n’étaient pas de simples échappatoires, mais des objectifs clairs : courir un Ironman, plonger sous la glace, réaliser l’ascension du Kilimandjaro. Des défis qui symbolisaient non seulement son désir de reconquérir son corps mais aussi de vivre pleinement chaque instant. « J’avais besoin de dépasser mes limites pour retrouver confiance en mon corps et me soigner la tête ». Bloqué dans son combat quotidien, il éprouve le besoin de trouver des ressources et de l’espoir ailleurs. Il a besoin de prouver aussi. « Ma famille, mes potes et les médecins me regardaient comme quelqu’un d’affaibli physiquement. Je voulais être l’inverse de ça. Je devais prouver que j’étais fort ».
Reconstruire son quotidien après avoir frôlé la mort
Dans le même temps, la tuberculose n’évolue plus. Victor n’est pas guéri pour autant mais il peut enfin quitter les méandres de sa chambre d’hôpital. Le plus dur commence. « À ce moment, c’est un peu la galère parce que je souhaite réaliser mes rêves mais le monde n’attend pas que Victor Bergeon réalise ses rêves. Donc il faut faire correspondre tout ça avec la réalité pour que le jeune mec que je suis, qui sort de ses études et qui n’a pas de boulot, puisse un jour voir ses projets se réaliser ». Il travaille d’abord en tant que réceptionniste de nuit dans un hôtel. 23 h – 7 h. Alors quand tout le monde dort autour de lui, Victor recommence à rêver. Il écrit beaucoup, reprend son carnet de notes dans lequel il avait imaginé des défis quelque temps auparavant. « Ces rêves, je les avais mais il fallait que je trouve un moyen d’en vivre. J’ai donc eu pour idée d’en faire des films. J’ai démissionné de mon boulot de réceptionniste et je me suis donné 6 mois pour essayer de rendre ce projet possible ».
C’est donc avec cette farouche volonté de donner un nouveau souffle à son existence qu’il va inonder le tout-Paris de mails, d’appels et de relances. Il tourne également un pilote avec deux base jumpers anglais qui le font sauter en tandem d’une falaise. « C’était pour prouver que je pouvais faire ces choses-là et apporter plus de crédibilité à mon dossier ». Cependant, le processus est long, les réponses se font rares et Victor commence à désespérer. « J’ai contacté toutes les chaînes de télévision et les boîtes de production de Paris mais je n’avais aucun contact avec ce milieu-là. Mon père est agriculteur, ma mère est retraitée de la sécurité sociale et vend des crêpes donc je n’avais aucune connexion avec le milieu de l’audiovisuel ». Jusqu’à ce qu’un jour, son dossier tombe sur le bureau d’une stagiaire qui le fait lire à la productrice, Sarah Lebas. « Elle m’appelle et me dit que mon projet lui plaît. Je n’y croyais pas trop mais on se rencontre et quelques mois plus tard on signe la série chez Canal + ». ' Voyages au bout de l’effort ' voit le jour.
Le bout du tunnel
Cette série documentaire va bien au-delà de la simple réalisation de défis physiques extraordinaires. Elle explore également les aspects émotionnels et mentaux de la transformation de Victor. Elle révèle comment il a dû surmonter ses peurs et ses doutes pour atteindre ses objectifs, et comment le sport est devenu un moyen puissant de renouer avec son corps et de regagner confiance en lui. « Ma volonté est de raconter les choses depuis le départ car je suis un grand trouillard et pas un grand sportif. Je veux donc montrer les différentes étapes pour chaque défi. Comment préparer ce qui paraît impossible pour moi ».
Hier cloîtré dans une chambre d’hôpital, Victor profite désormais de cette nouvelle perspective de vie, une véritable thérapie qui lui permet surtout de se réapproprier son corps et de dissiper ses doutes. À travers ses défis, il envoie également un puissant message sur l’importance de vivre pleinement, de poursuivre ses passions avec détermination, et de ne jamais permettre aux obstacles de définir les limites de ce qui est possible. Il est devenu un symbole de courage et de persévérance, non seulement pour ceux qui luttent contre des maladies graves mais pour quiconque cherche à surmonter ses propres peurs et limitations. « Récemment, j’ai été confronté à cette réalité. Je suis allé voir un jeune qui s’appelle Pierre qui a un cancer assez avancé et qui a eu une rechute. Il a découvert la série avec son papa. Ils m’ont donc demandé de passer les voir à l’hôpital pour lui donner un peu d’espoir et de courage » raconte-t-il la voix encore chargée d’émotion.
Sa série documentaire ne se contente pas de divertir ; elle inspire, éduque et, surtout, offre une perspective nouvelle sur la vie, poussant chacun à réfléchir à la manière dont nous faisons face aux défis et à la valeur que nous accordons à chaque instant de notre existence.
L’histoire de Victor n’est pas banale, certes mais c’est un vibrant plaidoyer pour le dépassement de soi, un rappel que, même dans les moments les plus sombres, il y a toujours un espoir et la possibilité de forger un nouveau chemin.